Loi pacte droit des sociétés

Conseils notaires

L’INTERET SOCIAL DEPUIS LA LOI PACTE

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L’intérêt social est une notion connue de tous les praticiens. Toutefois, l’intérêt social est difficile à définir concrètement et depuis la Loi Pacte, la sanction applicable en cas de non-respect de celui-ci n’apparait plus effective.

Alexandra Arnaud Emery Consultante droit des affaires NCE

La Loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises dite « LOI PACTE » a consacré légalement la notion d’intérêt social.

Les dispositions ci-après envisagées sont intégrées dans le chapitre « dispositions générales » et donc applicables à toutes les sociétés.

L’alinéa 2 de l’article 1833 du Code civil dispose « La société est gérée dans son intérêt social, en prenant en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son activité ».

Remarquons que pour les SA, cette notion a également été introduite aux articles L. 225-35 et L. 225-64 du Code de commerce : ceux-ci imposent désormais au conseil d’administration pour le premier et au directoire pour le second, de « déterminer les orientations de l’activité de la société et veiller à leur mise en œuvre conformément à son intérêt social » en prenant là encore « en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son activité ».

La Loi Pacte consacre le principe jurisprudentiel d’ « intérêt social » en y intégrant un concept propre à notre temps « la protection et le respect de l’environnement ».

Le non-respect de l’intérêt social est invoqué en vue de remettre en cause des actes ou délibérations qui lui seraient contraires. C’est en se fondant sur la violation de l’intérêt social que des affectations hypothécaires consenties par une société pour garantir la dette d’un tiers ont été annulées. C’est également au nom du respect de l’intérêt social qu’est reconnu l’abus de majorité ou encore contrecarrer le fait pour un associé de faire passer un acte dans son propre intérêt au détriment de celui de la société (vendre à vil prix).

Quelle sanction en cas de non-respect de l’intérêt social ?

Avant la Loi PACTE, la sanction encourue en présence d’une société à risques illimités est ou plutôt était la nullité, se basant sur les anciennes dispositions de l’article 1844-10 du Code Civil selon lequel « La nullité de la société ne peut résulter que de la violation des dispositions des articles 1832, 1832-1, alinéa 1er, et 1833, ou de l’une des causes de nullité des contrats en général ». C’est ainsi que la troisième chambre civile et la chambre commerciale de la Cour de cassation ont considéré nulle la sûreté consentie par une société civile au mépris de son intérêt social ce qui est notamment le cas lorsque, constituée sur l’unique immeuble figurant à l’actif de son patrimoine, elle l’expose à un risque de disparition dans l’hypothèse de sa réalisation. Il importe peu à ce titre, que la sûreté ait été conforme à l’objet social ou autorisée par les associés à l’unanimité ou aux conditions particulières prévues par les statuts (Cass. com., 6 janv. 2021, n° 19-15299 : Gaz. Pal. 16 févr. 2021, n° 397h6, p. 33, note C. Albiges). Dans cette décision, l’hypothèque portait sur l’unique immeuble de la société. La valeur de ce bien était inférieure à la créance garantie et sa constitution n’était accompagnée d’aucune contrepartie pouvant justifier le risque de disparition auquel la société était exposée. On rappellera que la troisième chambre civile a écarté cette contrariété lorsque la valeur de l’immeuble servant d’assise à la sûreté, est supérieure à la créance garantie de sorte que les sommes devant revenir à la société garante lui permettent de poursuivre la réalisation de son objet social (Cass. 3e civ., 21 déc. 2017, n° 16-26500 : LPA 17 avr. 2018, n° 134z5, p. 12).

La loi PACTE a en partie amendé l’article 1844-10 du Code civil qui est désormais rédigé de la manière suivante : « La nullité de la société ne peut résulter que de la violation des dispositions de l’article 1832 et du premier alinéa des articles 1832-1 et 1833, ou de l’une des causes de nullité des contrats en général.(…). La nullité des actes ou délibérations des organes de la société ne peut résulter que de la violation d’une disposition impérative du présent titre à l’exception du dernier alinéa de l’article 1833, ou de l’une des causes de nullité des contrats en général. Désormais, l’intérêt social est une disposition impérative mais dont la méconnaissance ne peut entraîner la nullité de la société ni celle de la décision